Les obligations transition sont lancées

You are currently viewing Les obligations transition sont lancées

Ce nouvel outil de financement garanti par l'Etat a vocation à accélérer la transition écologique. Chronique juridique de Guillaume Dolidon, avocat au Barreau de Paris, Dolidon Partners.

A la fin du mois de novembre, l’Etat a finalisé le cadre réglementaire des obligations transitions (OT), nouvel outil de financement déployé en collaboration avec les assureurs et les sociétés de gestion (analogue aux obligations relance qui avaient permis de soutenir les entreprises après la crise sanitaire) destiné aux PME et aux ETI immatriculées en France pour accélérer la transition écologique de l’économie. Ces obligations, qui pourront être émises entre début 2025 et fin 2029, bénéficieront d’une garantie de l’État, afin de favoriser l’accès à des financements à long terme, soutenant ainsi la transition vers une croissance plus verte et une économie durable.

Les obligations transitions visent à favoriser le financement de projets considérés comme peu rentables à court terme et insuffisamment couverts par les offres commerciales des réseaux bancaires et s'inscrivent dans le cadre plus général paquet législatif européen dit « Fit for 55 » qui a pour ambition de réduire, au plus tard en 2030, de 55 % les émissions de gaz à effet de serre de la France par rapport à 1990. 

Ce nouveau cadre pourrait offrir des perspectives stratégiques à des secteurs comme celui des énergies renouvelables (comme le photovoltaïque ou l’éolien) où les financements sont souvent contraints par des mécanismes de subventions et/ou de tarifs de rachat réglementés qui, de fait, compartimentent leur développement ou rendent leur acquisition difficilement accessible à certaines catégories d’entreprises désireuses de produire leurs propres besoins en énergies.   

Ces obligations vertes ont été créés par la loi de finances pour 2024 (loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023) complétée par un décret n°2024-752 du 7 juillet 2024, et plus récemment, un arrêté du 19 novembre 2024, lesquels textes encadrent leurs caractéristique, définit les investissements éligibles comme les modalités de la garantie octroyée par l’Etat aux fonds d’investissements qui les souscrivent. 

Caractéristiques des obligations transition et de leurs émetteurs 

L’obligation transition est un dispositif de financement à long terme garanti par l’État avec une durée fixée de huit ans et un différé d’amortissement de quatre ans. Le dispositif sera distribué à partir de début 2025 jusqu’au 31 décembre 2029.

Seules peuvent émettre des obligations susceptibles de figurer à l’actif des fonds d’investissements concernés les personnes morales inscrites au répertoire national des entreprises et des établissements mentionné à l’article R. 123-220 du code de commerce, qui remplissent les trois conditions suivantes :

  • Elles relèvent de la catégorie des petites et moyennes entreprises (PME) (telle que cette notion est définie par l’annexe I du règlement n°651/2014 du 17 juin 2014 de la commission européenne) ou de la catégorie des entreprises de taille intermédiaire (ETI) (telle que cette notion est définie par le décret du 18 décembre 2008) ;
  • Elles ont à la fois, à la date d’émission de l’obligation (i) un chiffre d’affaires supérieur à 2 millions d’euros au titre du dernier exercice clos et (ii) une capacité à honorer leurs engagements financiers (évalué par une notation de crédit et par des indicateurs financiers définis dans les conventions conclues entre l’Etat et les fonds d’investissement bénéficiaires des garanties). 
  • Elles ne relèvent pas des catégories suivantes :  sociétés civiles immobilières, organismes de placement collectif immobilier, établissements de crédit, sociétés de financements, entreprises en difficulté et entreprises exerçant dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture. 

Les investissements éligibles

Les investissements éligibles au dispositif de financement sont ceux qui, de manière générale, ont pour objectif d’améliorer la performance environnementale de l’entreprise, ce qui recouvre trois catégories d’investissements :

  • Les investissements d’équipement en faveur notamment :
  • De la protection de l’environnement ;
  • De l’acquisition de véhicules propres ;
  • De la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables ;
  • De la protection et de la restauration de la biodiversité. 
  • Les investissements qui soutiennent la mise en œuvre de solutions par des PME (les ETI sont donc ici exclues) dont l’activité principale est liée à la transition écologique ou consiste en la production, la distribution ou l’installation de technologies liées à la transition écologique (notamment énergie, réseaux électriques, industrie et transports et gestion des déchets), à condition que ces activités représentent au moins 50% du chiffre d’affaires de l’entreprise, ou au moins 50% des dépenses, dans l’un ou l’autre cas par référence à l’exercice précédant l’émission de l’obligation. 
  • Les investissements réalisés par des PME (les ETI sont également ici exclues) en transition qui sont en mesure de produire auprès de la société de gestion des fonds d’investissements concernés : (i) un bilan d’émission de gaz à effet de serre et un plan d’action qui fixe leurs objectifs de décarbonation et de leurs actions pour les réduire. 

On peut se féliciter du degré de précision avec lequel est détaillée, dans les annexes I et II de l’arrêté du 19 novembre 2024, la liste des équipements et des activités éligibles au dispositif, ce qui participera assurément de l’efficacité de sa mise œuvre grâce à la prévisibilité ainsi offerte pour les entreprises concernées. 

Le mécanisme de garantie octroyée par l’Etat

Les dispositif prévoit que les obligations transition seront placées dans deux fonds gérés par des sociétés de gestion partenaires : (i) un fonds d’alignement d’intérêt qui hébergera 20% des encours qui ne seront pas garantis par l’Etat et (ii) un fonds garanti qui conservera 80% des encours. 

Comme les précédentes obligations relance, les obligations transition seront souscrites par un ou plusieurs fonds d'investissement alternatifs (FIA) régis par le code monétaire et financier qui bénéficieront de la garantie de l'Etat à hauteur de 100 % sur les éventuelles premières pertes, dans la limite de 5 milliards d’euros et jusqu'à un maximum de 30 % de l'encours du fonds.

Les conditions préalables à l’émission des obligations transition

L’arrêté du 19 novembre 2024 précise la nature des informations et des éléments qui doivent être fournis au fonds d’investissement susceptible de souscrire les obligations à émettre au soutien d’un dossier qui comprendra notamment :

  • Un plan d’investissement avec une description du projet, son montant, et sa localisation ;
  • Une déclaration détaillée de l’ensemble des aides publiques dont l’entreprise candidate bénéficie ;
  • Un justificatif répondant aux caractère d’éligibilité fixés par le décret et l’arrêté. 

Le succès des obligations « relance », émises jusqu’à fin 2023 avec un dispositif comparable, et qui avait particulièrement mobilisé le secteur des sociétés de gestion et des assureurs, offre des perspectives positives pour cette nouvelle formule d’obligations, au bénéfice de la transition écologique, et du soutien de l’industrie verte souhaité par la France.  

Partager cet article