La Société de Libre Partenariat Spéciale : un nouveau véhicule d’investissement en droit français 

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Alice Bouchaudy et Stéphanie Hamis (Arsene)

Dans un contexte de renforcement de l’attractivité financière de la place de Paris, l’ordonnance n° 2024-662 du 3 juillet 2024 a créé un nouvel outil d’investissement : la Société de Libre Partenariat Spéciale (« SLPS »). Inspirée de véhicules étrangers comme les Sociétés en Commandite Spéciales (« SCSp ») luxembourgeoises ou les « Limited Partnerships » britanniques, la SLPS est conçue comme un cadre juridique souple, contractuel et fiscalement neutre. La loi de finances pour 2025, adoptée mi-février[1], est venue compléter ce dispositif en fixant les règles fiscales applicables en la matière.

La SLP avait été créée en 2015 déjà avec la même ambition : celle de concurrencer les véhicules existants à l’étranger. La SLP a permis d’introduire plus de souplesse, mais est resté un véhicule sans doute trop « français » pour certains investisseurs étrangers. Sur le plan juridique, il s’agit d’une société en commandite simple. Les investisseurs étrangers n’ont pas retrouvé tous les marqueurs propres aux partnerships anglosaxons ou à la SCSp luxembourgeoise, véhicules complètement transparents, la SLP disposant quant à elle de la personnalité morale. Bien qu’ayant tout de même rencontré un certain succès, ce véhicule hybride n’a ainsi pas permis de répondre pleinement à la demande de certains investisseurs en leur offrant un véhicule vraiment similaire à ce qu’ils pouvaient trouver à l’étranger. Sa forme juridique soulevait ainsi des questions fiscales pour certains investisseurs étrangers qui considéraient ce véhicule comme opaque.

Les caractéristiques de ces nouvelles SLPS ? Une absence de personnalité morale et une responsabilité limitée des associés, assorties le plus souvent d’une grande souplesse des modalités de fonctionnement (assez proche de la SCSp luxembourgeoise). Aucun véhicule de ce type n’existait en droit français.

La SLPS se distingue dès lors par son absence de personnalité morale propre et son fonctionnement largement régi par le contrat entre les associés. Elle peut être constituée par un ou plusieurs associés commanditaires, investisseurs passifs, dont la responsabilité se limite à leurs apports, et un associé commandité, responsable indéfiniment des dettes sociales. Ce régime permet une grande liberté contractuelle, notamment en matière de gouvernance, de répartition des bénéfices et des droits de vote, et de modalités de sortie. 

Juridiquement, la SLPS est dépourvue de capital social minimum et n’est en principe pas soumise aux règles du Code de commerce applicables aux sociétés commerciales. La simplicité de sa constitution et la souplesse de ses règles statutaires en font un outil attractif pour les investisseurs recherchant un véhicule d’investissement agile. Elle se prête donc aussi bien à l’accueil de fonds de capital-investissement que de fonds immobiliers.

La SLPS présente néanmoins certains caractères similaires aux entités dotées de la personnalité morale : dénomination, siège social, immatriculation au registre du commerce et des sociétés, et surtout un patrimoine propre. Si ces caractéristiques peuvent paraître étonnantes dans le cadre juridique français existant, ces caractéristiques peuvent néanmoins se retrouver chez les véhicules étrangers que la SLPS cherche à concurrencer.

L’ordonnance de juillet 2024 n’avait pas précisé le régime fiscal de la SLPS, laissant cette question en suspens. La loi de finances pour 2025 met fin à ces incertitudes et transpose à la SLPS le même régime fiscal que celui de la SLP, elle-même assimilée aux fonds professionnels de capital investissement (FPCI) constitués sous la forme de fonds commun de placement. Ce régime permet notamment, sous réserve du respect de certaines conditions, une imposition des associés uniquement lors de la répartition des profits.

Ainsi, la SLPS s’inscrit dans une dynamique de modernisation du droit français des sociétés d’investissement. Elle complète l’arsenal déjà existant, et devrait contribuer, après sans doute une première phase de test les premières années, à un renforcement de l’attractivité des fonds français sur la scène internationale.

[1] Loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025

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