Réorienter l’épargne pour relancer l’économie

  • Poste publié :21 mai 2021
  • Catégorie de poste :Stratégie
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Le Cercle des Economistes a organisé une journée de conférences cette semaine sur le thème du rôle de la finance dans la sortie de crise. Le consensus est clair : l’épargne des Français doit être mieux orientée vers le financement des entreprises. Si le processus a déjà commencé, l’ouverture du private equity aux particuliers et une refonte des règles prudentielles aideront à atteindre l’objectif.

 

La sortie de crise passera par le fléchage de l’épargne des ménages vers les entreprises qui ont besoin de fonds propres. Le constat s’est imposé lors de la conférence organisée cette semaine par le Cercle des Economistes sur le thème : “Comment la finance peut-elle contribuer à la sortie de crise?”. 

Cette épargne, déjà très abondante, s’est encore accumulée depuis le début de la crise sanitaire. 110 milliards d’euros supplémentaires ont été placés dans les bas de laine des Français l’an dernier. Et à la fin 2021, ce surplus pourrait même atteindre 160 milliards, selon l'OFCE. Même si les particuliers reviennent à la Bourse depuis un an, cette réserve dort pour l’essentiel sur des comptes bancaires ou dans des produits très liquides aux rendements très faibles (Livret A, Livret de Développement Durable, fonds en euros...).

Evolutions positives

Les intervenants des tables rondes ont d’abord noté que les mentalités commencent à évoluer.  

Sur les 2700 milliards de placement dont disposaient les assureurs fin 2020, 60 % étaient déjà placés dans les entreprises. Si en 2020, nous avons enregistré une décollecte globale de 6,5 milliards d’euros sur les contrats d’assurance-vie, la collecte a en revanche été positive de 18 milliards d’euros sur les unités de compte. Le modèle de l’assurance-vie à la française est bien en train de se transformer, malgré la crise de 2020 et l’arrêt de l’activité commerciale due à la crise sanitaire”, a commenté Florence Lustman, présidente de la Fédération Française de l’Assurance.

Même son de cloche du côté de Philippe Heim, président du directoire de la Banque Postale : “Nous notons un changement structurel. Les taux bas des fonds en euros ont conduit les ménages à reconsidérer leurs choix d’investissement. Nous assistons à une bascule vers les unités de compte, avec une collecte brute actuelle de 26% vers ces supports”.

Les Français pas réfractaires

L’évolution ressort également des premières conclusions de l’étude lancée par Yomoni, le service d’épargne en ligne, en partenariat avec Viavoice: 

Le placement sans risque est plébiscité par une écrasante majorité des Français (84 %) mais une partie non négligeable de la population (45 %) déclare aussi détenir une épargne risquée. Si les épargnants français restent familiers d’une forme d’épargne sécurisée, l’aspiration à une épargne plus personnalisée, plus dynamique et surtout à davantage de liberté dans les choix est également révélée. Loin d’être réfractaires, les Français expriment plutôt un besoin d’information et d’accompagnement au service de cette quête d’autonomie dans la gestion de leur épargne.”.

Confiance et éducation financière

Beaucoup d’efforts restent néanmoins à faire, et notamment pour la restauration de la confiance envers la finance, même si elle tend à s’améliorer avec la montée en puissance des investissements verts et sociaux. “Cela passe par une meilleure éducation financière. A nous de mieux expliquer les choses et de faire en sorte que ces sujets soient intégrés très tôt dans les parcours scolaires. Les gens attendent trop longtemps avant de se constituer une épargne financière”, a estimé Eric Pinon, président de l’Association Française de la Gestion financière (AFG), qui vient de rejoindre le Comité stratégique d’éducation financière. 

Face à la volatilité de la Bourse et à une contraction de la cote ces dernières années, les placements en private equity constituent une alternative à développer et à mettre au service des épargnants qui souhaitent investir dans les PME. 

En octobre dernier, la Banque Publique d’Investissement (BPI) a lancé un fonds commun de placement à risque, BPI France Entreprise 1, accessible dès 5000 euros. Au vu du succès rapide de la collecte, il faut aller plus loin et de nombreuses sociétés de gestion y réfléchissent ou passent à l’action.

Assouplir les règles 

Les investisseurs sont prêts à sacrifier une partie de la liquidité pour gagner en rendement”, a estimé Patrick Artus.

Le directeur de la recherche économique chez Natixis et membre du Cercle des Economistes a néanmoins pointé les obstacles réglementaires qui freinent encore le processus en cours : “Il faut que les intermédiaires financiers (banques et assurances) puissent diversifier leurs actifs pour un meilleur financement des entreprises. Mais cela implique pour l’instant un engagement massif et coûteux en fonds propres de leur part. Il faut donc assouplir progressivement les règles prudentielles et de solvabilité qui les orientent aujourd’hui vers les instruments de dette et essoufflent le financement de l’économie”.

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