Quelles règles pour la commercialisation des FIA?

  • Publication publiée :28 juin 2022
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La fourniture d’un conseil portant sur des parts ou actions de FIA (Fonds d'investissement alternatifs) constitue un acte de commercialisation soumis à des conditions que les conseillers en investissements financiers doivent impérativement respecter, sauf à encourir la sanction suprême : l’interdiction d’exercer la profession. Chronique juridique de Philippe Glaser, avocat associé chez Taylor Wessing.

Par deux décisions récentes, en l’espace de quelques semaines, la Commission des sanctions de l’AMF vient de rappeler quelques règles en matière de commercialisation de titres de FIA (fonds d’investissement alternatif).

La matière est pourtant loin d’être nouvelle mais à l’évidence, tout comme en matière de biens divers, les textes peuvent parfois donner lieu à des interprétations divergentes ; on peut aussi penser que certains sont particulièrement peu vigilants à l’occasion de la commercialisation de ces fonds d’investissement dont les sous-jacents sont parfois assez atypiques.

Dans ses diverses communications, l’AMF ne manque pas de rappeler que le simple fait pour un CIF de fournir un conseil en investissement sur des parts ou actions de FIA est constitutif d’un acte de commercialisation, laquelle est strictement encadrée.

Client professionnel ou non

On rappellera que les règles de commercialisation diffèrent dans cette matière, selon que la cible est un client professionnel ou non.

Pour ce qui est des premiers, les FIA établis dans l’espace économique européen sont commercialisés en France dès lors qu’ils ont fait l’objet d’une procédure de passeport européen.

La règle est plus complexe car plus protectrice s’agissant des clients non professionnels dès lors que le CIF - qui ne peut faire opter ses clients non professionnels pour le statut de client professionnel – se doit de vérifier lui-même que l’AMF a autorisé préalablement le FIA étranger ou celui géré par un gestionnaire étranger (DOC-2014-03).

Faute de cela, le risque est grand de supporter les foudres de l’AMF.

Les deux décisions de l’AMF du 26 avril 2022 et du 25 mai suivant sont venues rappeler les conditions de cette commercialisation mais surtout la définition d’un FIA puisque dans ces deux affaires, les CIF sanctionnés avaient contesté cette qualification.

Dans la première espèce, il était reproché au CIF d’avoir commercialisé des parts de sociétés de droit allemand dont l’objet était de lever des capitaux auprès d’investisseurs selon une politique d’investissement préalablement définie ; la qualification de FIA n’était pas contestée.

Le CIF rémunéré par le promoteur du produit s’engageait aux termes d’une convention d’apporteur d’affaires à lui « indiquer » des investisseurs potentiels ; il conseillait à ces derniers la souscription de parts de ces sociétés (FIA).

Reverse sollicitation?

Pour échapper aux sanctions encourues, le CIF a fait valoir qu’il ne pouvait y avoir de conseil puisqu’il n’y avait pas de rapport écrit et surtout que les investisseurs étaient à l’origine de la demande de souscription (« reverse sollicitation ») de sorte qu’il ne pouvait y avoir d’actes de commercialisation (AMF DOC-2014)04).

Les deux moyens ont été écartés. 

Le premier parce que l’absence d’écrit ne peut constituer un moyen de preuve selon lequel aucun conseil n’aurait été fourni.

Le second dès lors que les demandes prétendument spontanées de souscription des produits querellés émanant des investisseurs avaient repris pour certaines d’elles un modèle-type de lettre, étant précisé que la Commission des sanctions avait relevé la campagne plus générale de commercialisation menée par le CIF poursuivi.

Pour ces faits principalement, le dirigeant de la société est interdit d’exercer la profession de CIF pour une durée de 5 année.

Le 25 mai suivant, le Commission des sanctions de l’AMF frappe à nouveau pour des faits identiques s’agissant d’un CIF a qui il était reproché d’avoir commercialisé des actions de sociétés en commandite par actions (SCA).

Ici encore, la Commission a considéré que les SCA en cause constituaient des organismes de placement collectif (et donc des FIA en application de l’article L214-24 du CMF) ) dès lors que (i) leur objet s’apparentait à un placement susceptible de générer des rendements financiers, avec un objectif de mutualisation aux fins de dilution du risque avec un pouvoir accordé au seul gérant, (ii) qu’elles levaient des capitaux auprès de plus d’un investisseur et (iii) qu’une politique d’investissement définie préalablement aux souscriptions (actifs immobiliers) avait été définie.

Dix ans d'interdiction

Aucun dépositaire ni SGP n’ayant été désignés, la commercialisation des actions de ces sociétés n’était pas possible nonobstant la « convention d’apporteur d’affaires » passée par le CIF avec chaque SCA, ladite commercialisation constituant « un comportement par nature contraire à l’intérêts de ses clients ».

Ce manquement et d’autres relevés à l’occasion du contrôle ont entraîné pour la société CIF et son dirigeant une interdiction d’exercer l’activité de CIF pour une durée de 10 ans.

De tout ceci, il convient de retenir que le conseil donné sur la souscription de titres n’est jamais une opération anodine.

Or, la matière est particulièrement réglementée sur le sujet.

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