La réglementation européenne (CRR) impose désormais que les expositions sur personnes publiques extérieures à l'Union européenne doivent remplir des critères de notation. La législation française est en cours d'adaptation en conséquence et sera applicable le 8 juillet 2022. Chronique juridique de Xavier de Kergommeaux, associé chez Gide Loyrette Nouel A.A.R.P.I.
En application de la loi française initialement applicable aux sociétés de crédit foncier, les expositions sur personnes publiques susceptibles d'être acquises par des sociétés de crédit foncier étaient "des éléments d'actif, tels que des prêts, ou des engagements hors bilan sur [notamment] des administrations centrales, banques centrales, établissements publics, collectivités territoriales ou leurs groupements, d'un Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, des Etats-Unis d'Amérique, de la Suisse, du Japon, du Canada, de l'Australie ou de la Nouvelle-Zélande". Dès lors que les personnes publiques concernées appartenaient au périmètre ainsi défini, aucun critère de notation n'était requis pour que les expositions sur ces personnes publiques soient éligibles à l'actif des sociétés de crédit foncier.
Traitement applicable aux covered bonds
Or en application de l'article 129 b) du CRR (Capital Requirement Regulation) dans sa version actuelle (Règlement (UE) n ° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement), pour que les obligations foncières émises par le sociétés de crédit foncier puissent bénéficier du traitement préférentiel applicable aux covered bonds, les expositions sur personnes publiques extérieures à l'Union européenne, quel que soit le pays tiers concerné, doivent remplir des critères de notation : premier échelon ou, dans certaines limites, deuxième échelon de la qualité de crédit définie dans le CRR. La législation française est en cours d'adaptation en conséquence et sera applicable le 8 juillet 2022.
Des sociétés de crédit foncier peuvent donc détenir aujourd'hui des expositions sur personnes publiques qui, lors de leur acquisition, remplissaient pleinement les critères alors applicables (puisque les pays dans lesquels se trouvent ces personnes publiques étaient compris dans la liste des pays alors éligibles) mais qui ne remplissent plus les nouveaux critères (à défaut de bénéficier de la notation nouvellement imposée). La cession de tels actifs n'est pas nécessairement opportune compte tenu de la valeur de marché de ces actifs ou de l'impact qu'une telle cession aurait sur le montant total des actifs éligibles détenus par les sociétés de crédit foncier concernées.
Il est dès lors envisageable que la société de crédit foncier concernée sollicite d'un établissement de crédit disposant de la notation suffisante qu'il garantisse les expositions sur personnes publiques devenues inéligibles, afin que ces expositions relèvent d'une notation ainsi améliorée.
Deux catégories distinctes
Les expositions sur personnes publiques bénéficient parfois d'un rehaussement de crédit. Ces rehaussements peuvent relever de deux catégories distinctes :
Un rehaussement sollicité par la personne publique elle-même lors de l'émission des titres bénéficiant de ce rehaussement ; ce rehaussement bénéficie à tous les titres émis relevant de la souche (identifiée par son code ISIN) bénéficiant de la garantie du rehausseur ;
Un rehaussement sollicité par le détenteur des titres pour pallier une notation insuffisante ou inexistante de l'émetteur et permettant à ce seul détenteur de bénéficier d'un risque rehaussé et de la notation du rehausseur.
Une exposition sur personne publique bénéficiant de l'un des rehaussements susvisés reste une exposition sur personne publique au sens de l'article 129 b) du CRR. Le fait que le rehausseur soit un établissement de crédit ne reclasse pas l'exposition sur personne publique en une exposition sur un établissement de crédit au sens de l'article 129 c) du CRR (qui ne vise d'ailleurs que les expositions sur des établissements de crédit et non les expositions garanties par des établissements de crédit, à la différence de l'article 129 b) qui vise expressément "les expositions sur, ou garanties par, des" personnes publiques).
Bien qu'aucun des rehaussements susvisés ne soit expressément visé ni exclu par l'article 129 b) du CRR, il est logique de considérer que l'exposition sur personne publique bénéficiant d'un tel rehaussement "relève", au sens de cet article 129 b), de l'échelon de qualité de crédit du rehausseur. Le fait que le rehaussement soit interne (sollicité par l'émetteur) ou externe (sollicité par le détenteur de l'exposition) apparaît indifférent pour l'appréciation de l'échelon de qualité de crédit visé par ledit article.