Un outil supplémentaire d’au moins 200 milliards d’euros devrait être nécessaire

  • Publication publiée :19 juillet 2022
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Avis d'expert d’Alexandre Hezez, stratégiste du Groupe Richelieu, en vue de la réunion de la BCE de cette semaine. 

La Banque centrale européenne ira « aussi loin que nécessaire » pour lutter contre l'inflation « excessivement élevée » et qui devrait le rester « pendant un certain temps encore» en zone Euro, avait prévenu Christine Lagarde, en ouverture du forum annuel à Sintra. La présidente de la BCE voit dans le choc d'inflation du moment « un grand défi pour sa  politique monétaire».

Selon nous, la prochaine réunion de la BCE qui aura lieu cette semaine devra répondre à 4 objectifs :

  • Être crédible comme barrage contre l’inflation, à l’image de Jerome Powell et en vue de chiffres encore très/trop importants

  • Éviter une fragmentation des pays de la zone Euro, surtout au lendemain de l’approbation définitive de l'Union Européenne à l'adhésion de la Croatie à l'euro dès janvier 2023

  • Ne pas plonger la zone Euro dans une récession prononcée (une récession étant déjà hautement probable)

  • Soutenir implicitement l’euro face au dollar (et diminuer l’inflation importée).

La BCE est dans une situation délicate car elle doit augmenter les taux d'intérêt pour lutter contre l'inflation, tout en évitant de mettre des États déjà très endettés dans la zone Euro en grande difficulté financière. Cette perspective a fait resurgir le risque d'une crise de la dette en zone Euro à l’image de ce que nous avions connu en 2011. Durant le mois, la BCE a dû s'employer à rassurer les investisseurs en annonçant les préparatifs en vue d'un nouvel « instrument anti-fragmentation » pour éviter que l’écart de taux entre l’Italie et l’Allemagne ne dépasse 200 bps. Un seuil difficilement acceptable en terme de déficit budgétaire pour l’Italie

Ce nouvel instrument devra être efficace, tout en étant proportionné et contenir des garanties suffisantes pour préserver l'élan des États membres vers une politique budgétaire saine. Reste à savoir si le consensus au sein du Conseil d'administration de la BCE est assez fort pour fournir une puissance de feu suffisante pour défendre ce niveau et réduire le risque de fragmentation financière. Cette question a toujours été une source de tensions parmi les décideurs européens.

Selon nous, le réinvestissement du PEPP semble trop faible, et un outil supplémentaire d'au moins €200 Mds devrait être nécessaire. Nous pensons que ce n’est pas par hasard que, le 4 juillet dernier, le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne a annoncé qu’elle allait « tenir compte du changement climatique dans ses achats d’obligations d’entreprises, son dispositif de garanties, ses exigences de déclaration et sa gestion des risques, conformément à son programme d’action pour le climat ». Ces mesures ont été présentées comme s’inscrivant dans la feuille de route climatique annoncée un an auparavant à l’issue de sa révision stratégique, mais l’annonce montre la détermination de la BCE d’être un acteur de référence dans la transition écologique.

Pour créer un consensus global sur un nouvel outil, la BCE pourrait mettre en place par exemple des achats sur les obligations vertes pour amener des financements des États et accélérer la transition énergétique. Si ce nouvel outil est crédible, la normalisation des taux d’intérêt pourra s’opérer sans encombre et être positive pour l’Euro. La BCE pourrait même hausser son taux directeur de 50 bps pour marquer ses ambitions. Dans le cas contraire, la réaction des marchés financiers sera négative compte tenu du contexte géopolitique.

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