Les yeux et les oreilles sur le ton de Mme Lagarde

  • Publication publiée :3 février 2022
  • Post category:Avis d'expert
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(Photo : Finn Protzmann-Unsplash)

par Kevin Thozet, membre du Comité d'Investissement de Carmignac, avant la réunion de la BCE ce jeudi

Sur le papier, il n'y a pas grand-chose à attendre de la réunion d'aujourd'hui. La plupart des annonces ont été faites lors de la dernière réunion de la BCE (fin du PEPP en mars, baisse du rythme des achats nets d'actifs, projections macroéconomiques, l'APP gravé dans le marbre au moins pour les mois à venir) ; et en décembre, les deux projections et Mme Lagarde ont fait allusion au côté accommodant, repoussant la possibilité de hausses des taux d'intérêt dès 2022.

Pourtant, depuis lors, nous avons vu l'inflation continuer à surprendre à la hausse dans toute l'Europe dont le pic ne cesse d'être repoussé à la fois dans le temps et en intensité.

Tous les yeux et les oreilles seront donc rivés sur le ton et les commentaires de Mme Lagarde autour de l'inflation et sur la façon dont elle évalue les dernières surprises sur le front de l'inflation, dans un contexte où l'inflation est "dangereusement" proche du seuil de 2% et les incertitudes sont inclinées à la hausse.

En effet, selon ses dernières prévisions, la BCE s'attendait à une inflation de 3,2% en 2022 et de 1,8% en 2023 (à comparer aux attentes du marché supérieures à 4,5% et 2% respectivement) et les derniers développements sont sûrement pris en compte par l'institution. Plus important encore, la BCE avait pris en compte une forte hausse des salaires à 3%, qui était déjà intégrée alors même qu'elle a ajouté à ses achats d'actifs en décembre.

L'inflation actuelle de la zone euro à 5,1 % (contre une attente consensuelle de 4,4 %) a été principalement tirée par les prix de l'énergie, mais pas uniquement, avec une certaine augmentation des éléments centraux du panier d'inflation également.

La BCE sautera-t-elle son tour comme en 2017/2018 ?

C'est loin d'être certain compte tenu de la vigueur de l'inflation réalisée et de la hausse plus faible mais non négligeable des anticipations d'inflation par rapport à la période 2017/18. Dans le cycle précédent, les États-Unis étaient seuls. La Banque centrale européenne était en attente aux côtés (en grande partie) de la Banque d'Angleterre, de la Riksbank et de la Reserve Bank of Australia. Ce cycle, la Banque d'Angleterre a déjà augmenté et d'autres banques centrales mondiales évoluent rapidement dans cette direction

Le marché s'attend à ce que la BCE augmente une fois d'ici la fin de l'année et deux fois de plus en 2023, portant le taux de dépôt à 0,25 % d'ici la fin de 2023. Semblable à ce que nous avons vu pendant la majeure partie de 2021, les marchés ont évalué la Réserve fédérale, la Banque d'Angleterre ou la Banque du Canada plus que leurs orientations, et finalement ont été vérifiées auprès de ces banques centrales ont finalement changé leurs positions. Outre une inflation plus élevée, en Europe, les prix du marché reflètent également les inquiétudes des acteurs du marché concernant la composition globale belliciste du Conseil des gouverneurs, qui comprend de nombreux anciens ministres des Finances des pays du Nord qui ont exprimé leur opposition aux politiques non conventionnelles telles que l'assouplissement quantitatif et taux de dépôt négatifs.

Enfin, en ce qui concerne les inquiétudes sur les pays très endettés, ce ne sont pas les 3 hausses qui sont susceptibles d'avoir un impact significatif sur la soutenabilité de la dette étant donné que la durée moyenne des émissions a été allongée de manière significative. La préoccupation porte plutôt sur les programmes d'achat d'actifs qui sont actuellement censés se terminer avant la première hausse. Celles-ci ont été cruciales pour contrôler les écarts. Selon les prévisions actuelles, l'assouplissement quantitatif devrait prendre fin avant la hausse des taux d'intérêt. Ce n'est pas prévu avant au moins neuf mois - mais c'est le financement de déficits records à des niveaux d'endettement particulièrement élevés qui est la principale préoccupation concernant les obligations d'État de la zone euro.

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